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Discrimination : licencier un salarié juste après son burn-out, c’est plus que risqué

Un salarié licencié pour insuffisance professionnelle, très peu de temps après qu’il ait informé son employeur de difficultés de santé liées à ses conditions de travail, est présumé victime de discrimination, sauf si son employeur peut prouver le contraire. C’est ce que souligne la Cour de cassation dans cette jurisprudence du 5 février 2020.

Une précipitation suspecte

Dans cette affaire, un salarié, engagé en 1989, avait été déclaré apte dans le cadre de sa visite périodique du 23 juillet 2014, puis placé en arrêt maladie en raison de son état dépressif à compter du 28 juillet.

Le 17 septembre, il avait informé ses responsables de la raison médicale de son arrêt (burn-out). À partir de là, tout était allé très vite, puisque convoqué à un entretien préalable à licenciement le 25 septembre, il avait été licencié pour insuffisance professionnelle le 10 octobre.

Invoquant notamment une discrimination en raison de son état de santé (c. trav. art. L. 1132-1), le salarié avait saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la nullité de son licenciement et le paiement des sommes afférentes.

Les juges prud’homaux et la cour d’appel avaient admis le caractère injustifié du licenciement pour insuffisance professionnelle, mais écarté les demandes liées à sa nullité, car selon eux, les circonstances de l’affaire ne laissaient pas présumer un licenciement discriminatoire.

À tort, puisque la Cour de cassation censure la décision des juges d’appel, auxquels il était reproché de ne pas avoir respecté les règles de preuve en la matière.

L’employeur ne prouve pas l’absence de discrimination donc le licenciement est nul

Devant la Cour, le salarié soutenait d’une part, que la concomitance entre l’engagement d’une procédure de licenciement et son courriel d’alerte et d’autre part, l’absence de cause réelle sérieuse du licenciement notifié, constituait la preuve d’une discrimination prohibée en raison de son état de santé.

Rappelons qu’en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination. S’il y a suffisamment d’éléments en ce sens, il revient à l’employeur de prouver, que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination (c. trav. art. L. 1134-1). À défaut, il est condamné pour discrimination (cass. soc. 7 février 2012, n° 10-19505, BC V n° 54).

Or, dans cette affaire, alors que l’employeur avait engagé une procédure de licenciement seulement 8 jours après avoir reçu un courriel d’alerte d’un salarié de plus de 25 années d’ancienneté l'informant de ses difficultés de santé en relation avec ses conditions de travail, les griefs invoqués pour motiver le licenciement, n’étaient pas établis.

Pour la Cour de cassation, ces éléments de faits laissaient supposer l’existence d’une discrimination en raison de l’état de santé du salarié, contrairement à ce qu’avaient estimé les juges du fond.

L’affaire est renvoyée devant une autre cour d’appel et l’employeur aura sans doute du mal à apporter la preuve contraire et à échapper à une condamnation pour licenciement discriminatoire…

Cass. soc. 5 février 2020 n° 18-22399 D